Compte-rendu critique concernant la conférence du

23 avril 2001: "Regards sur la violence conjugale"

 

1. Déroulement de la conférence

 

PAllocution d’entrée de Mr Alluin, Député permanent de la province du Hainaut.

 

 

PIntroduction du sujet par Mr Carrier, Docteur en sciences politiques (ULB) et formé en psychanalyse.

 

Il est indispensable pour lui d'approcher cette problématique sous un angle multidisciplinaire.  Dans ce type de violence, il y a une primauté de la gente masculine sur la gente féminine ce qui entraîne donc une subordination des femmes.  Il ajoute qu’il y a systématiquement une hiérarchisation entre les hommes et les femmes à plusieurs niveaux dont le niveau cognitif.

 

PIntervention de Mme Rigomont, directrice du Collectif et Refuge pour femmes Battues de la région de La Louvière: "vingt ans d’action et de réflexion auprès des femmes victimes de violences conjugales".

 

Selon les statistiques existantes, une femme sur cinq est victime de violence, tandis qu’une femme sur deux est assassinée.  Les chiffres ne sont pas nombreux en Belgique.

 

Le collectif et refuge pour femmes battues de la région de La Louvière a été créé en 1979.

 

Elle décrit les différentes formes de violence qui peuvent exister:

 

-  la violence physique

-  la violence verbale

-  la violence psychologique (il s’agit du comportement de quelqu’un qui sait tout, qui menace,…)

-  la violence économique (moyen de contrôle permanent)

-  la violence sexuelle (crainte de la sexualité)

 

 

Mme Rigomont précise que la méthode employée à l’association de La Louvière est une méthode d’intervention féministe globale au niveau communautaire, social, collectif, … .

 

Le refuge pour femmes battues de La Louvière a pour objectif de donner du pouvoir aux femmes.  L’agresseur y est reconnu comme ayant des comportements violents.  On y reconnaît les responsabilités de l’agresseur.  La femme est considérée comme une victime ayant du pouvoir.

 

Le conjoint violent refuse en général la thérapie conjugale, et la plupart des femmes mettent au point des stratégies pour diminuer la violence.

 

Mme Rigomont a effectué une présentation du cycle de la violence:

 

 

                           Culpabilité extrême à excuses et rémission

                                       Minimisation et Culpabilité

 

 

 

 

Violence                                                                               Lune de miel

 

 

 

 


                                         Quotidien du couple

                             (stress, tensions, menaces, frustrations)

 

Au cours de cycle, il n’y a généralement aucune remise en question du mari.

Selon l'intervenante, on peut aider la femme (si elle le veut) tout en respectant ce cycle.

 

Il y a différents facteurs intervenant dans le cycle et dont il faut tenir compte:

 

-  les menaces de l’agresseur (suicide,…)

-  la femme est diminuée (peur d’assurer la vie seule avec les enfants)

-  les problèmes économiques

-  la méconnaissance des droits

-  le soutien de l’entourage

-  la dépression

-  la femme est isolée

 

Mme Rigomont précise que les femmes partent quand la violence a été trop loin.  Il est important en tant qu’intervenant de respecter le rythme de rupture.

 

La notion de victimologie est également à connaître, il s’agit de l’incapacité apprise de la femme battue.  C’est ce qui leur permet de supporter la violence pendant plusieurs années.

 

Le travail réalisé par le Refuge pour femmes battues de la région de La Louvière est un travail collectif.  Il consiste à aider les femmes à exprimer leur honte, à extérioriser leurs sentiments.  Le travail est basé sur le cycle de la violence sous forme de jeu.  Il y a aussi une grille reprenant plusieurs émotions (utilisée au début et à la fin du séjour).

 

Un travail est aussi effectué sur la restauration de l’estime de soi pendant douze semaines à raison d’une fois par semaine.  Ce travail se base sur les stéréotypes masculins et féminins, ainsi que sur l’image de soi et le corps.  Mme Rigomont explique qu’un travail est aussi réalisé auprès d’enfants et des adolescents afin de leur permettre d’exprimer leur vécu de violence sous forme de sketches.

 

PMme Coruzzi (Collectif et Refuge pour Femmes Battues de La Louvière): Aspect juridique de la violence conjugale.

 

En cas de violence conjugale, il y a intervention du droit pénal.  En effet, les comportements violents sont jugés inadmissibles par la loi.

 

A ce sujet, Mme Coruzzi va donner plusieurs précisions:

 

-  Les menaces ne sont pas prises en compte par la loi (exemple: "je vais te tuer"), mais bien les menaces avec conditions (exemple: "je vais te tuer si…"). En Belgique, la violence, le harcèlement moral n’est pas punissable.  Mais par contre, les menaces écrites sans condition ou les menaces gestuelles sont punissables.  Ce qui peut poser problème à ce niveau est la notion de preuve et de prise au sérieux.  En effet, les menaces ne sont pas toujours prises au sérieux par les forces de l’ordre.

 

-  La loi pénale prend en compte le viol (pénétration à n’importe quel endroit avec n’importe quel objet).  Ici se pose le problème de la preuve et de la crédibilité.

 

-  Concernant les coups et blessures, la loi reconnaît la violence physique.  Il y a un véritable combat mené par les femmes pour cette reconnaissance ("loi sur la paix des dames").

 

-  Depuis 1998, la loi punit le harcèlement.  Mais généralement, l’homme violent poursuit au-delà de la séparation (harcèlement post-séparation).  Le harcèlement est défini comme "tout comportement dont l’auteur sait qu’il peut perturber la victime" (par exemple: téléphoner sans cesse).  La personne harcelée peut alors porter plainte.

 

En ce qui concerne la procédure pénale, très peu d’agresseurs sont poursuivis.

Au départ, le ministère public a connaissance de l’infraction par la police.  Il considère l’infraction et demande alors à la police des devoirs d’informations (preuves).  Les critères d’appréciation sont: l’existence ou non d’infraction, la prescription, et l’importance accordée à l’infraction.

 

S'il y a poursuite, le Ministère public a plusieurs possibilités (dans le cadre des délits):

 

-  il fait citer la personne ayant commis l’infraction devant le tribunal correctionnel;

-  la personne a recours à la médiation pénale, c’est à dire que l’agresseur ne va pas devant le tribunal mais en conditionnel.  Le procureur décide alors d’une réparation, mais au préalable il est important que l’agresseur reconnaisse son infraction.

 

Mme Coruzzi souligne néanmoins un point négatif à cette procédure pénale.  En cas d’arrestation de l’agresseur, ce dernier est en arrestation administrative pendant 12h et en arrestation préventive s’il est arrêté pendant 24h.  La décision est prise selon l’état de dangerosité.  Après 24h il est libérable sauf si la Chambre du Conseil décide de le garder (en cas de dangerosité + l’acte commis est punissable de plus d’un an de prison).

 

La plainte est un acte dont la police prend note, et qui est signée par la personne.  Lorsque la victime dépose la plainte, il est conseillé qu’elle se munisse d’un certificat identifiant les coups et blessures.  A chaque plainte, l’agresseur est entendu mais rien ne change (sentiment d’impunité).

 

PMme Leman, conseillère conjugale, animatrice à Canal J et membre de l’asbl Femmes Solidaires contre la violence de Tournai: Description des possibilités de prévention en matière de violence conjugale.

Son discours s’est articulé en plusieurs points.  Le premier a abordé l’historique de l’asbl.  Celle-ci a été créée en 1988, et avait pour buts la sensibilisation, un meilleur accueil réservé aux femmes battues ainsi que la création d’un refuge et d’un groupe de parole.

 

Cette asbl mène aussi une action de prévention pour les jeunes en association avec trois centres de planning familiaux ainsi qu’une AMO de Tournai.

 

L’action se base sur le programme "Virage", c’est à dire des animations réalisées dans le cadre de cours philosophiques.  Ces animations ont pour objectif de faire réfléchir les jeunes sur les questions concernant leurs relations amoureuses (jalousie, confiance, liberté,…).  La violence n’est donc pas directement abordée.

 

Elle reprend, dans son discours, les différentes étapes par lesquelles passe le couple dans l’apparition de la violence:

 

-  Au départ, le couple fonctionne bien (idéalisation);

-  Ensuite, on commence à être déçu de l’autre (déception);

-  Enfin, la violence explose (reproches,…).

Une autre alternative pour le couple est d’essayer de "comprendre" ses colères et sa violence, c’est à dire pouvoir verbaliser, "mettre des mots à la place des maux", en somme qu’il y ait plus de compréhension.

 

Mme Leman nous a ensuite expliqué comment se déroulaient les animations auprès des jeunes.  Le cadre dans lequel elles se déroulent est différent de la classe (les participants doivent respecter les autres,..).  Les animations commencent généralement par un "brainstorming" sur le mot "couple", ensuite le mot "violence".  Le groupe réalise aussi des sketches de situations de couple, il participe à un théâtre forum au cours duquel on insiste sur les accessoires.  Avant le sketch, on décrit le vécu des personnages.  Les participants peuvent emprunter deux voies: la violence ou la communication.

 

La "morale" de ces animations est de souligner l’importance du dialogue comme clé de réussite du couple.  Les élèves de rendent compte que l’agressivité n’est pas la violence.

 

Concernant l’évaluation du projet, Mme Leman nous a précisé qu’un questionnaire était remis avant et après les animations.  Une évaluation orale est également réalisée.

 

Pour clôturer, elle nous a expliqué les limites et difficultés de ces animations:

-  Il y a une remise en question constante;

-  Le nombre d’animatrices est restreint;

-  Les animations comportent certaines exigences (il s’agit de 3 séances consécutives  de 50 minutes);

-  Il y a insistance sur la communication ("je" au lieu du "tu"), écoute de l’autre, compréhension de ce que l’autre ressent.

 

Selon Mme Leman, il est important que l’expression des sentiments soit favorisée le plus tôt possible.

 

PIntervention de Mr Graver, membre de la campagne du Ruban Blanc.

 

Cette campagne a démarré au Canada et connaît actuellement un succès considérable.

 

Partout dans le monde, on retrouve la violence masculine.  Mr Graver pose la question suivante: "Le pouvoir de domination fait-il partie de l’éternel masculin?".  Il n’est pas inéluctable tant que la violence ne sera pas sanctionnée.  Celle-ci provient de la domination des hommes sur les femmes.  La violence est donc directement liée à la volonté de dominer l’autre.

 

Cependant, Mr Graver précise qu’il ne faut pas confondre violence et agressivité.  On a toujours considéré la violence comme un phénomène privé mais ce n’est plus possible actuellement.

 

La violence domestique est liée à un problème de communication.  Dans ce cas, le couple va consulter un thérapeute familial, mais précise Mr Graver, ce n’est pas la solution.  En effet, c’est parce qu’il y a violence de l’homme qu’il ne peut y avoir communication.

 

Autre question posée par l’orateur: "Qui sont ces hommes violents?".  A une femme battue correspond un homme battant.  Ils appartiennent à tous les milieux sociaux.  La plupart de ces hommes sont tout à fait ordinaires, normaux, considérés comme des hommes charmants.  Mais une fois revenus au foyer, ils deviennent loups.

 

Mr Graver décrit les trois caractéristiques communes de l’homme violent:

 

-Il a bien intégré les clichés de la masculinité (mais est peu sûr de lui-même) et a la volonté d’exprimer sa domination;

-Il est violent tellement il "aime" (ce qu’il fait est au nom de l’amour);

-Il dit que ça a été plus fort que lui mais sa femme n’avait pas besoin de faire ça (prise de contrôle, il sait où il doit s’arrêter).

 

Les images de l’homme et de la femme restent fort stéréotypées.  Selon Mr Graver, il est important d’agir sur les mécanismes sociaux.

 

PMr Van Hemelrijck, psychologue et psychothérapeute familial: Aspects psychologiques de la violence conjugale

 

L’homme est confronté à différentes contraintes: la première chose à faire avec les enfants est de donner un groupe d’appartenance, la famille confère une identité à l’enfant (exemple: "tu es un homme", "tu es une femme").  Au delà de cela, les familles produisent une différenciation (par le nom de famille).  Selon Mr Van Hemelrijck, la famille est donc un lieu de paradoxe.

 

 

Toutes les familles ne fonctionnent pas de la même manière.  Certaines sont dotées d’une mémoire qu’elles vont transmettre.  Au cours de l’éducation, l’enfant fait l’expérience qu’il peut ressembler ou prendre de la distance par rapport à ses parents mais en maintenant le lien.

 

Selon lui, la communication n’est pas toujours la solution.  Il ne faut pas toujours tout dire à sa compagne.  La communication n’est pas la chose la plus importante dans un couple, il faut aussi du lien.  Dans la relation, le couple se rencontre d’abord (fusion), où existent une complète proximité et une idéalisation.  Ensuite, il y a la déception qui peut entraîner la rupture.  Le couple va alors produire la capacité de pouvoir se différencier, et construire une appartenance.

 

La création d’un couple est la mémoire d’une grande proximité et d’un désaccord.  Il précise qu’il n’y a pas de bonne proximité ni de bonne distance.  Dans le couple violent, ces deux notions n’existent pas.

 

Mr Van Hemelrijck décrit ensuite deux scénarios de violence:

 

-  Violence basée sur des relations symétriques (transaction égalitaire) où chacun veut être à égalité (par exemple: le couple alcoolique).  Mais quand l’un des deux introduit la différence, il y a alors menace de rupture.  Il s’agit d’une violence difficile: celui qui est frappé sait que celui qui frappe n’est pas d’accord, cela va donc crescendo.

-  Violence basée sur la relation de domination.

 

Pour comprendre un homme violent, il faut comprendre pourquoi il est violent.  Ces hommes ne connaissent pas les signes avertisseurs.  Les femmes les connaissent mais ne le disent pas.

 

Les hommes battants et les femmes battues n’ont plus d’appartenance.  Seul leur reste le lien amoureux.

 

2. Apport théorique

 

2.1.                   Les enfants témoins de violence conjugale

 

Cet aspect n'a pas été abordé au cours de la conférence mais il me semble être un sujet important dans la problématique de la violence conjugale.  De plus, j'espérais en entendre parler.  Voilà pourquoi j'ai profité de ce compte-rendu pour effectuer une recherche plus approfondie.

 

Au Canada, 29 % des femmes sont victimes de violence physique de la part de leur époux ou de leur conjoint de fait (Rodgers 1994).   Selon d'autres études, 60 % à 80 % des enfants vivant dans une famille où la femme est maltraitée en sont témoins : ils le voient ou l'entendent (Jaffe, Wolfe et Wilson, 1990).  Autrement dit, de 11 à 23 % des enfants sont témoins chez eux de divers actes de violence.

 

Les enfants qui sont témoins de violence envers leur mère éprouvent des problèmes affectifs et de comportement analogues à ceux des enfants qui sont eux-mêmes soumis à de mauvais traitements physiques.  Ils souffrent souvent du syndrome de stress post-traumatique dont les symptômes sont: anxiété, crainte, irritabilité, pensées importunes et rappel d'images de la violence, explosions de colère imprévisibles et évitement des situations qui rappellent à l'enfant les actes de violence dont il a été témoin.

 

Les enfants témoins d'actes de violence éprouveront souvent des difficultés à se concentrer et connaîtront des problèmes de comportement et d'apprentissage.  Ils courent un risque plus élevé de dépression ainsi que le risque d'être soumis à des actes de violence physique et sexuelle par l'agresseur de leur mère.

 

De leur côté, les garçons qui sont témoins d'actes de violence de leur père à l'égard de leur mère courent plus de risques de devenir eux-mêmes des agresseurs dans leurs relations intimes conjugales.

 

La pratique de l'école buissonnière, la délinquance et les fugues sont courantes chez ces enfants qui ont besoin d'une aide spécialisée.

 

Plusieurs facteurs influencent la nature des problèmes rencontrés par les enfants et les adolescents exposés à la violence conjugale.

 

Ainsi, les difficultés sont généralement plus marquées chez les enfants qui sont à la fois témoins et victimes de violence (Hughes, 1988).  D'autres facteurs comme l'âge de l'enfant, son tempérament, son niveau d'estime de soi, ses habiletés cognitives et ses capacités d'ajustement ont une influence sur ses réactions (Hughes, 1997) tout comme la

nature et la fréquence de la fréquence dont il est témoin (Fantuzzo, De Paola, Lambert, Martino, Anderson et Sutton, 1991; Wolfe, 1985; O'Keefe, 1994) et la nature du soutien apporté par la mère (Wolfe, 1985; Jaffe et al., 1985; O'Keefe, 1994; Hughes, 1997).

 

Les très jeunes enfants, même s'ils ne sont pas conscients des dangers potentiels de la violence conjugale et même s'ils sont incapables de mettre des mots sur ce qu'ils vivent, sont affectés par la violence conjugale.  Certaines études ont observé des indices de difficultés chez les bambins et les très jeunes enfants: détresse émotionnelle, comportements immatures, réactions somatiques, régression du langage et de l'hygiène, cauchemars, hypervigileance (Osofsky 1998; Drell, Siegel & Gaensbauer, 1993 cités dans Arroyo et Eth, 1995).

Ces enfants sont également particulièrement à risque d'être eux-mêmes frappés parce qu'à cet âge, ils se retrouvent souvent dans les bras ou près de leur mère lors des épisodes de violence. L'insomnie et le sommeil agité sont des symptômes maints fois observés chez les enfants d'âge préscolaire.  Ces symptômes peuvent être aussi des indices d'un état de stress post-traumatique.

 

La confusion et l'insécurité provoquées par les épisodes de violence peuvent également faire régresser ces enfants qui deviennent alors dépendants des adultes de façon excessive (Arroyo et Eth, 1995).  Ils peuvent également perdre tout intérêt pour les jeux et l'exploration qui sont des éléments importants du développement de l'enfant.

 

À l'âge scolaire (6 à 12 ans), l'enfant dispose de plus de ressources pour composer avec les événements dont il est témoin.  Il a entre autres un meilleur contrôle de ses propres émotions, une compréhension plus réaliste des événements et un réseau social en dehors de sa propre famille (Wolak et Finkelhor, 1998).

 

Puisqu'il tend toutefois à prendre ses parents comme des modèles de rôles, il se sent confus et ambivalent envers le père agresseur tout particulièrement. Il n'est pas rare de voir apparaître des comportements agressifs, qui sont parfois plus apparents à l'entrée de l'enfant dans

le système scolaire, des problèmes de relation avec les pairs et des difficultés de concentration qui compromettent sa réussite scolaire.

 

L'enfant peut également souffrir d'anxiété, de dépression et d'une faible estime de soi (Wolak et Finkelhor, 1998).

 

Même si à mesure que l'enfant grandit il se sent généralement moins responsable de la violence, ils sont nombreux à intervenir de différentes façons pour mettre fin aux disputes et à s'inquiéter de la vulnérabilité de leur mère et de la fratrie (Jenkins et al., 1989 et Graham-Bermann, 1996a cités dans Wolak et Finkelhor, 1998).

Peu de données empiriques sont disponibles sur les adolescents exposés à la violence conjugale que celle-ci ait eu lieu pendant leur enfance ou qu'elle se situe à l'adolescence (Rossman et Rosenberg, 1997).

 

Même si les adolescents se sentent généralement moins anxieux et moins responsables des événements que les plus jeunes (Jaffe et al., 1990), certains jeunes exposés depuis plusieurs années vivent des difficultés.

 

Les enfants qui ont grandi dans un climat de violence ont, à l'adolescence, davantage de problèmes de délinquance et de comportements que les autres adolescents

(Thornberry, 1994 cités dans Wolak et Finkelhor, 1998). 

 

Les quelques travaux sur le sujet suggèrent également que la détresse émotionnelle vécue par plusieurs adolescents puisse aussi déboucher sur d'autres problèmes tels les fugues ou

la consommation abusive d'alcool et/ou de drogues. En outre, plusieurs adolescents sont impliqués eux-mêmes dans des relations amoureuses abusives (Jaffe et Gefner, 1998; Harold et Conger, 1997 cités dans Cummings, 1998).

 

Il est donc difficile d'affirmer que l'âge de l'enfant peut s'avérer être un facteur de protection; même si les réactions diffèrent, l'exposition à la violence conjugale affecte les enfants de tous les âges.

PQuelques statistiques sur les conséquences sur les enfants de la violence conjugale[1]

 

Selon un sondage fait auprès de 6000 familles américaines, 50 % des hommes qui ont fréquemment agressé leurs femmes ont aussi abusé de leurs enfants.

 

La violence dirigée sur un enfant est 15 fois plus présente dans les familles où la violence conjugale est présente.

 

Les hommes qui ont subi de la violence étant jeune sont trois fois plus à risque d'abuser leur femme et leurs enfants que les autres.

 

Les enfants qui sont témoins de la violence à la maison démontrent des troubles de comportement et des troubles émotifs aussi diverses que le retrait, la faible estime de soi, les cauchemars, l'autopunition et l'agression contre ses pairs et les membres de sa famille.

 

Un enfant qui a subi de la violence à la maison est beaucoup plus à risque de devenir délinquant.

 

Plus de 3 millions d'enfants risquent d'être exposés à la violence parentale chaque année.

 

 

PLes stratégies d'intervention auprès des enfants et des adolescents

 

Les voies d'action auprès des enfants et des adolescents exposés à la violence conjugale prennent forme à travers des stratégies d'intervention diversifiées. 

 

Certaines de ces stratégies consistent essentiellement en des interventions individuelles auprès d'enfants ou d'adolescents perturbés par la dynamique de violence présente dans leur famille (Silvern et Kaersvang, 1989; Davis, 1991, Burman et Allen Meares, 1994; Silvern et Landis, 1995; Arroyo et Eth, 1995).

 

D'autres s'intègrent à des programmes plus vastes dans lesquels est offert un éventail de services individuels et/ou de groupe à l'intention des mères, des enfants ou des adolescents et, dans certains cas, des conjoints violents; c'est le cas, notamment, des interventions réalisées dans le cadre du « Domestic Abuse Project » (Grunski et al., 1988; Johnson et

Montgomery, 1990; Peled et Edleson, 1992; Peled et Davis, 1995 et Peled et Edleson, 1995).

 

D'autres, enfin, se greffent aux actions mises en place dans les maisons d'hébergement pour femmes victimes de violence (Hughes, 1982; Alessi et Hearn, 1984; Jaffe, Wilson et Wolfe, 1986; Gibson et Gutierrez, 1991). Ces dernières interventions s'intègrent, le plus souvent, dans un ensemble de services offerts en parallèle aux enfants et à leurs mères.

 

Outre le contexte dans lequel elles s'inscrivent, les pratiques d'intervention recensées dans les écrits se distinguent sous différents aspects, notamment : leurs fondements théoriques ou leurs orientations idéologiques, leurs objectifs, leurs cibles d'intervention, leur méthode, la nature de leur programme d'activités et leur stratégie d'évaluation des résultats.

 

-  les fondements théoriques et idéologiques

 

Les interventions recensées dans les écrits souscrivent à différentes perspectives théoriques ou idéologiques.  Les principales sont : l'apprentissage social, les théories développementales, l'hypothèse de la désorganisation familiale, l'impuissance apprise, la perspective féministe, l'approche systémique et le désordre post-traumatique.

 

Selon la théorie de l'apprentissage social (Bandura, 1973), l'observation, l'imitation et le renforcement sont les principaux modes d'apprentissage des comportements.  Ainsi, lorsqu'il se retrouve dans un contexte de violence conjugale, l'enfant fait l'apprentissage de la violence comme moyen de résolution de conflits puisqu'il reçoit comme message que le recours à la violence est un comportement acceptable, voire normal, en situation de conflits.  Cette

théorie est d'ailleurs souvent avancée pour expliquer le cycle intergénérationnel de la violence.

 

La stratégie d'intervention privilégiée consiste à mettre l'enfant en contact avec des modèles de comportements positifs.

 

Les théories développementales mettent en évidence la vulnérabilité des enfants et leur dépendance à l'égard des adultes qui les entourent pour trouver réponse à leurs besoins.  Ces théories fournissent une explication à la réaction des enfants victimes de violence conjugale en soulignant que leur niveau de développement et, particulièrement leur maturité cognitive et émotive, ne les rend pas toujours aptes à comprendre les événements dont ils sont témoins et à

cerner adéquatement à quels facteurs attribuer la responsabilité de ce qui leur arrive (Davis, 1991).

 

Ces théories fournissent trois points de repères pour comprendre la réaction des enfants et articuler des interventions pour faire contrepoids aux conséquences négatives de cette expérience : (1) la vulnérabilité de l'enfant en fonction du stade de développement cognitif et émotif, (2) l'influence du niveau de développement sur les capacités d'analyse en matière

d'attribution de la violence et (3) l'importance de miser sur les capacités, les forces et le potentiel de développement que possèdent les jeunes ( Pâquet-Deehy et al., 1997).

 

L'hypothèse de la désorganisation familiale «family disruption» (Widom, 1989) est dérivée à la fois de la théorie de l'apprentissage social et de la théorie des systèmes (Jaffe et al., 1990).

 

Ce modèle explique les conséquences négatives de la violence conjugale en faisant référence à deux types d'impact : a) un impact direct, attribuable au fait que l'enfant qui vit dans un

contexte de violence conjugale est exposé à des comportements déviants, et b) un impact indirect, résultant du fait de vivre dans un environnement inadéquat et de faire l'objet d'un encadrement parental erratique.

 

D'après ce modèle, les enfants sont affectés directement par la violence conjugale puisqu'ils sont exposés à un pattern de relations interpersonnelles basé sur la violence et ils en sont également affectés indirectement en raison de la désorganisation familiale à laquelle la violence contribue, désorganisation qui se traduit généralement par la diminution des capacités parentales, l'instabilité affective et résidentielle, la détresse au sein de la fratrie et l'anticipation de la violence (Jaffe et al., 1992).

 

La théorie de l'impuissance apprise (Seligman, 1975) fournit également des repères pour comprendre la réaction des enfants exposés à la violence conjugale.  Ainsi, selon ce modèle, du fait de leur absence de contrôle sur les événements qui se produisent dans leur environnement familial, ces enfants ressentent un sentiment d'impuissance et en viennent

à présenter des signes de dépression et des symptômes somatiques semblables à ceux de la mère.  En outre, une telle situation contribue à éroder l'estime de soi. Cette théorie  apporte certaines indications pour l'intervention.  Pâquet-Deehy et al. (1997) les résument ainsi :

1) travailler à identifier et exprimer ses sentiments,

2) valider l'expérience vécue,

3) enseigner au jeune qu'il peut avoir un certain pouvoir sur son vécu (« empowerment ») et 4) faire naître l'espoir.

 

La perspective féministe a largement contribué à la reconnaissance et à la condamnation de la violence au sein de la famille non seulement en dénonçant l'ampleur du phénomène, mais en relevant les symboles sociaux qui implicitement contribuent au maintien du pouvoir des hommes sur les femmes.

 

Cette perspective véhicule la nécessité de développer des interventions qui, tout en mettant l'accent sur la responsabilité de l'agresseur et la validation des blessures causées par la violence, comportent des objectifs sociaux axés, notamment, sur la disparition des stéréotypes

sexistes, le développement de rapports égalitaires entre homme et femme au sein de la famille, et la promotion de l'égalité des sexes et des rôles sociaux : « la démarche d'aide implique [alors] non seulement une relation égalitaire entre les parties mais aussi un processus de conscientisation au regard de la violence » (Beaudoin, Côté, Deslile, Gaboury,

Guénette et Lessard, 1998).

 

Selon Pâquet-Deehy et al. (1997), l'intégration des principes de la perspective féministe

devrait conduire à des interventions qui sont marquées par les préoccupations suivantes :

 

1) informer sur le phénomène de la violence et l'identification des personnes qui doivent en assumer la responsabilité,

2) questionner les valeurs,

3) questionner les stéréotypes,

4) travailler en groupe,

5) favoriser le développement de liens interpersonnels,

6) valider le vécu,

7) favoriser l'expression des émotions,

8) restaurer l'estime de soi,

9) favoriser le contrôle des personnes sur leurs conditions d'existence « l'empowerment ».

 

Certaines interventions auprès des enfants exposés à la violence conjugale s'inscrivent dans une approche systémique (Gentry et Eaddy, 1980). 

 

Selon cette perspective, la violence constitue généralement le symptôme d'un dysfonctionnement familial, dysfonctionnement dont le dénouement implique tous les membres de la famille.  Ainsi, dans les interventions souscrivant à cette orientation, la cible est généralement la famille : les enfants, la mère et l'agresseur sont très souvent sont impliqués dans la démarche d'intervention.

 

Selon Jaffe et al. (1992), le syndrome du stress post-traumatique « Post-Traumatic Stress Disorder (PTSD) » constitue davantage un modèle descriptif qu'un modèle théorique.  Le PTSD s'applique particulièrement aux enfants qui ont été exposés à des épisodes sévères de violence conjugale.  En effet, plusieurs des symptômes qui caractérisent le syndrome du stress post-traumatique peuvent être décelés chez ces enfants, à savoir :

(1) présence d'un événement traumatisant,

(2) ré-expérimentation de l'événement traumatisant dans la cadre de cauchemars, d'images spontanées ou de pensées intrusives,

(3) diminution de la réponse émotive aux événements courants,

(4) trouble du sommeil,

(5) pertes de mémoire,

(6) difficultés de concentration,

(7) évitement de situations qui peuvent réactiver le souvenir de l'événement traumatisant.

 

Ce survol rapide des modèles théoriques ou des orientations idéologiques qui servent de toile de fond aux interventions qui sont développées pour venir en aide aux enfants et aux adolescents qui sont victimes de violence conjugale témoigne, par la multiplicité et la diversité des perspectives suggérées, que celle-ci est une réalité à multiples facettes à la fois quant à ses causes et quant à ses conséquences (Jaffe et al. 1992; Lancup et Vaillant, 1996).

 

-  les objectifs des stratégies d'intervention recensées dans les écrits

 

La plupart des stratégies d'intervention s'adressant aux enfants et adolescents victimes de violence conjugale qui ont été recensées prennent la forme de groupes d'éducation structurée dont les objectifs gravitent autour des éléments suivants :

 

* informer ou éduquer les enfants en regard du phénomène de la violence,

* amener les enfants à exprimer leurs sentiments ou à parler de leur vécu de violence,

* favoriser le développement des habiletés sociales et l'apprentissage de stratégies non violentes de résolution de conflits,

* restaurer l'estime de soi,

* développer des scénarios de protection,

* enrichir le réseau de soutien social,

* déresponsabiliser face à la violence au sein de la famille.

 

En fait, ces différents objectifs pourraient être regroupés en trois grandes catégories : les objectifs pragmatiques, les objectifs thérapeutiques et les objectifs de prévention (Ragg, 1991).

 

Les premiers portent sur le développement de la capacité de l'enfant de faire face aux situations de violence sans encourir de danger pour sa propre sécurité; l'exemple

le plus typique concerne le développement de scénarios de protection adaptés à sa situation.

 

Les objectifs thérapeutiques se réfèrent à l'impact de l'exposition à la violence sur le bien-être affectif, psychologique ou social de l'enfant.  Les objectifs suivants appartiennent à cette catégorie :

* aider l'enfant à exprimer ses sentiments d'anxiété et d'insécurité,

* restaurer son estime de soi,

* le déresponsabiliser face à la violence présente dans sa famille.

 

Enfin, les objectifs de prévention ont une portée à plus long terme; ils sont orientés vers l'arrêt de la transmission intergénérationnelle de la violence (Ragg et Webb, 1992).

 

Le développement des habiletés sociales, l'apprentissage de stratégies non violentes de résolution de conflits, la valorisation de comportements pacifiques, la sensibilisation

aux manifestations de contrôle dans les relations amoureuses sont autant d'énoncés qui traduisent ce troisième type d'objectifs.

 

-  Les cibles d'intervention

 

L'étude des objectifs d'intervention ne peut évidemment être faite sans tenir compte des personnes qui sont visées par les actions mises en place.  En effet, il existe un lien étroit entre la cible d'intervention, i.e. les personnes visées par l'intervention, et les objectifs poursuivis.

 

Par exemple, dans le programme de Ragg (1991), étant donné la dépendance et la vulnérabilité des enfants d'âge pré-scolaire, les objectifs visant le développement de stratégies et de scénarios de protection sont mis en priorité.  Par ailleurs, avec les enfants d'âge scolaire, comme les interactions avec les pairs sont une avenue importante de socialisation, plusieurs intervenants choisissent d'accorder une attention particulière à l'acquisition de stratégies non violentes de résolution de conflits et au développement des habiletés sociales tout en

maintenant les objectifs de sécurité et de protection et de déresponsabilisation.  Avec les adolescents, les objectifs font très souvent référence à l'identité sexuelle, aux rapports de genre ainsi qu'à la place du pouvoir et de la violence dans les relations amoureuses.

 

L'importance accordée au niveau de développement des enfants dans la détermination des objectifs d'intervention et le choix des stratégies privilégiées fait en sorte que la plupart des interventions qui sont présentées dans les écrits s'adressent à des populations très homogènes en regard de l'âge : le plus souvent ces groupes se situent dans les paramètres suivants :

(1) enfants d'âge pré-scolaire (3-5 ans),

(2) enfants du début du primaire (6-8 ans),

(3) enfants du deuxième cycle du primaire (9-11 ans),

(4) pré-adolescents (12-13 ans)

(5) adolescents (14 ans et plus).

 

Lorsque l'âge de la population cible s'étale sur une plage plus étendue, la nature des objectifs et des stratégies d'intervention est adaptée selon les caractéristiques de chaque enfant.

Par ailleurs, dans certaines interventions, la cible n'est pas limitée à l'enfant; les intervenants cherchent également à impliquer dans la démarche d'intervention les autres membres de la famille (Gentry et Eaddy, 1980), la mère de l'enfant (Hugues, 1982; Gibson et Gutierrez, 1991; Tutty et Wagar, 1994; Lancup, 1995) ou d'autres adultes en lien avec l'enfant

(Hugues, 1982).  Cette action auprès de personnes présentes dans l'entourage de l'enfant peut avoir des visées multiples.

Selon Tutty et Wagar (1994), il est important d'engager les parents à la fois pour favoriser la participation de l'enfant à la démarche d'intervention et pour leur donner accès à du soutien dans l'exercice de leur rôle parental.

 

-  les méthodes d'intervention

 

En regard des méthodes d'intervention, la plupart des interventions recensées dans les écrits s'appuient sur l'intervention de groupe, méthode qui est parfois combinée avec des interventions individuelles (Gentry et Eaddy, 1980; Hugues, 1982; Gibson et Gutierrez, 1991).  Dans la plupart des cas, il s'agit de groupes fermés, c'est-à-dire de groupes dont les membres demeurent les mêmes du début à la fin du programme, avec un contenu structuré autour d'un programme pré-établi en fonction de la population ciblée et des objectifs visés.

 

La majorité des programmes comprennent entre 10 et 12 rencontres; ils correspondent en cela à des programmes de courte durée (Courtois, 1988).  Le plus souvent, il s'agit de rencontres hebdomadaires d'environ 90 minutes qui sont co-animées par un homme et une femme.

 

Cette co-animation a pour but de servir de modèle à des relations interpersonnelles respectueuses et non violentes entre un homme et une femme.

Elle permet aux enfants d'observer comment les différences d'opinions peuvent se régler de façon harmonieuse.

 

-  l'évaluation des résultats

 

Bien que les évaluations soient généralement informelles et basées sur les impressions cliniques des intervenants et sur les commentaires des participants, les résultats rapportés sont généralement positifs.

 

Les évaluations plus systématiques de Jaffe, Wilson et Wolfe (1986) et de Wagar et Rodway (1995) de même que celles de Peled et Edleson (1992) et de Peled et Davis (1995) ayant portées sur le Domestic Abuse Project, indiquent que l'intervention peut contribuer à rehausser l'estime de soi des enfants, à modifier leurs attitudes à l'égard de la violence et développer leurs habiletés de protection.

 

PEn guise de conclusion

 

La réalité des enfants qui vivent dans un contexte familial marqué par la violence entre les conjoints est un phénomène de mieux en mieux connu, du moins dans ses conséquences à court terme.

 

Évidemment, la prévalence du problème demeure difficile à estimer, de même que son impact à plus long terme sur le fonctionnement social et sur les relations intimes.

 

En fait, plusieurs limites méthodologiques sont constatées dans les recherches sur le sujet, limites qui tiennent aux différences dans les définitions du concept de violence conjugale, à l'évaluation de la violence vécue par l'enfant, à l'utilisation de données rétrospectives, à l'absence de représentativité des échantillons, aux instruments utilisés et aux

sources des données (Holden, 1998; Pâquet-Deehy et al., 1997).

 

Bien que les recherches récentes confirment les résultats d'études antérieures à l'effet que les enfants exposés à la violence conjugale connaissent des problèmes au niveau de leur développement émotionnel et comportemental (Kolbo, et al. 1996), les données sur les aspects social, cognitif et physique sont toutefois trop limitées pour en tirer des conclusions définitives (Kolbo et al, 1996).

 

Également, la plupart des recherches sur les effets à court terme de la violence conjugale ne s'appuient pas sur un modèle théorique explicite, bien que les modèles de l'apprentissage social, du stress post-traumatique ou de l'impuissance apprise s'y profilent souvent en filigrane.

 

Ce caractère « a-théorique » des recherches rend difficile le développement d'une compréhension cohérente des effets de la violence sur les enfants qui y sont exposés (Holden,

1998; Rossman et Rosenberg, 1997).

 

De plus, peu de recherches se sont penchées jusqu'à maintenant sur la perception des enfants de la violence dont leur mère est victime et de ses conséquences sur leur vie.

Le sens qu'ils donnent à cette expérience est rarement étudié.  Pourtant ces dimensions sont importantes pour l'intervention.

 

Les recherches de Boutin (1998) et de Bourassa et Turcotte (1998) figurent parmi les rares travaux ayant privilégié cette perspective.

 

Les connaissances actuelles sont toutefois suffisamment convergentes pour reconnaître la nécessité de développer des actions pour venir en aide aux enfants dont le quotidien est truffé d'injures, de menaces, de coups, de blessures, de pleurs, de désespoir et de mensonges.

 

Les premières actions en regard de la violence conjugale ont été orientées vers les femmes; d'une part, parce qu'elles en étaient les premières victimes, d'autre part, parce qu'elles étaient considérées comme les personnes les mieux placées pour venir en aide à leurs enfants.

 

Cependant, les observations sur le désarroi des femmes lorsqu'elles traversent une période de crise et sur les réactions des enfants exposés à la violence conjugale ont fait prendre conscience de la nécessité d'intervenir directement auprès des enfants et des adolescents.

Mais en même temps, il est incontournable de promouvoir des interventions à d'autres niveaux visant à dénoncer la violence, à changer les valeurs, à modifier les rapports sociaux entre les hommes et les femmes et à faire la promotion de conduites égalitaires et pacifiques.

 

Pour contrer la violence et ses effets, il est essentiel d'agir non seulement sur les personnes,

mais sur leur environnement social et politique, d'où la pertinence incontournable de l'analyse féministe.

 

Tout en poursuivant les actions actuelles, il est essentiel de réfléchir sur les nouvelles avenues qui pourraient être avantageusement empruntées pour, à plus long terme, éliminer la violnece et, à plus court terme, en atténuer les effets.

 

Actuellement, un débat important est en cours sur la nécessité d'encadrer l'intervention auprès des enfants exposés à la violence conjugale à l'intérieur de paramètres légaux.

 

De par la position qu'ils occupent, les intervenantes et les intervenants sont bien placés pour s'interroger sur les forces et les limites des actions actuelles et pour collaborer au développement de nouvelles voies d'action adaptées aux besoins des enfants et des adolescents exposés à la violence conjugale, et respectueuses de la réalité des femmes qui subissent cette violence.

 

3. Bibliographie

 

Sites Internet:

 

http://www.marievincent.org/Victimes/Temoins/temoins.html

 

http://www.osde.ca/Congres/4e_Congres/s18.pdf

 

Ouvrages:

 

Cahiers critiques de thérapies familiales et de pratiques de réseaux, Crises de couple: perspective thérapeutique, ed De Boeck Université, Bruxelles 1999.

 

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[1]Tiré du document : Les enfants exposés à la violence conjugale et familiale: Guide à l'intention des éducateurs et des intervenants en santé et en services sociaux préparé par Marlis Sudermann et Peter Jaffe, pour Santé Canada